FLECHE SANT MICHEL

les" alpinistes" de l'entreprise Adret en pleine opération faucon. Spectaculaire...(photo G. Bonnaud)
A l'initiative de la Ligue pour la protection des oiseaux,la flèche Saint-Michel a été équipée hier d'un gîte pour les faucons pélerins.
Une opération délicate menée à 95 mètres de hauteur

BERTRAND POUPARD

Les ignorants pourront toujours dire, histoire de placer un "mot " à bon compte : " Tout ça pour héberger un faucon ! Qui plus est pèlerin… "
Ce que la Ligue de protection des oiseaux a réalisé hier dans la flèche Saint-Michel, par le truchement des "alpinistes" de l'entreprise Adret, spécialisée dans les travaux aériens sur monuments historiques (par exemple, à la Cathédrale Saint-André), relève de la plus haute écologie urbaine.
Hauteur est d'ailleurs le plus grand dénominateur commun à tous les mots pouvant décrire l'opération conduite durant plus de quatre heures à l'intérieur de la flèche qui, tout
à côté de la basilique (XVe et XVIe siècles) pointe, on le sait, à 114 mètres dans le ciel bordelais. la LPO, dont un des adhérents les plus éminents; M, Jacques Beauvilain, avait remarqué l'année dernière la présence d'un faucon pèlerin mâle, puis deux cette année - un mâle et une femelle cette fois -, il s'agissait de mettre en place un caisson qui puisse intéresser les

"tourtereaux " (!) au point d'adopter cet abri pour y nicher. L'intérêt de la tentative doit être compris dans une perspective de géographie européenne.
M. Olivier Le Gall, président de la délégation Aquitaine de la LPO, présent sur les lieux hier après-midi explique:
" Suite à la protection dont ils font l'objet depuis1976, notamment du fait de l'interdiction du DDT, ces rapaces qui se trouvent en bout de chaîne alimentaire sont revenus petit à petit dans la grande région. Déjà, ils ont colonisé les falaises de Dordogne où ils nichent de manière naturelle. Les voir séjourner en ville, de surcroît par couples,était très intéressant, car ils ont leur rôle à jouer en milieu urbain où ils consomment au moins un pigeon par jour et quelques étourneaux.
Savez-vous qu'en Amérique duNord, de véritables politiques de fixation sont menées en leur faveur ? "

Grâce à l'observation de Jacques Beauvilain, la LPO a donc offert un toit aux deux faucons pélerins de Saint-Michel qui feront peut- être des petits… à condition qu'ils ne cassent pas leurs oeufs réputés fragiles. Mais, pour ce faire, la maison des rapaces n'est pas

passée dans la flèche comme une lettre à la poste...
Après avoir escaladé, le caisson sur le dos, l'escalier de l'édifice jusqu'à son apogée, soit une cinquantaine de mètres de hauteur,
les "Adret" ont dû ensuite le hisser dans la partie "aérienne " de laflèche. Jusqu'à 95 mètres ! Et ce, en utilisant un système de cordages et de poulies auquel le vent donnait de la gîte. Empruntant eux-mêmes les barres d'échelle delà flèche, ils sont allés fixer le caisson dans les joints (pas dans les pierres afin de ne pas altérer la résistance de celles-ci). Au total, l'opération aura pris plus de quatre heures.

Cet exploit mérite bien un de ces coups de carillon qui vont si bien dans l'air de Saint-Mich'. A condition, bien sûr, qu'il ne donne pas le "bourdon" aux premiers intéressés
.

SUD-OUEST, JEUDI 20 JUILLET 2000